[Traduit de l'anglais]

Sensibilisation du public au droit d'auteur, OMPI, juin 2002

Geofrey Yu, sous-directeur général en charge du droit d'auteur (copyright) à l'OMPI, a déclaré ce qui suit dans un article, « Sensibilisation du public au droit d'auteur », en juin 2002. Il est intéressant de voir qu'à l'OMPI, ils commencent à trouver que l'hypocrisie de décrire un système de restrictions imposées au public en termes de « droits » commence à se retourner contre eux.

D'abord le message. Pour qu'il passe bien, je recommande de mettre un bémol sur la référence aux « droits ». Le terme en soi est parfaitement acceptable, mais dans le langage de tous les jours, il a une connotation négative de droits sans les devoirs correspondants qui implique « nous contre eux » [sic]. Ça ne va donc pas, car nous voulons gagner le public et le consommateur à notre cause. Malheureusement, nous ne pouvons pas remonter le temps et trouver un nouveau terme à la place de « droits d'auteur » (ou « copyright ») mais nous pouvons au moins retirer le terme « droits ». Le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT) concerne la protection des interprètes et des producteurs de phonogrammes. Le mot « droit » est opportunément absent de leurs titres. Nous devrions prendre exemple sur eux.

Au sein de la communauté du droit d'auteur telle qu'elle est représentée aujourd'hui dans cette salle, c'est parfait de se référer aux artistes, compositeurs, interprètes et entreprises comme à des « détenteurs de droits ». Mais c'est une mauvaise pratique de relations publiques que d'employer les mêmes termes lorsque l'on s'adresse à des politiciens, à des consommateurs ou au public. Avec eux, nous devons utiliser des termes dénués de jargon juridique, qui soient au minimum neutres, ou mieux, porteurs de significations que le public puisse identifier. Ainsi les « détenteurs de droits » doivent devenir des peintres, des écrivains, des sculpteurs, des musiciens. Ce qui fonctionne bien aujourd'hui avec des publics non spécialisés, ce sont des termes comme « culture », « créativité », « information », « divertissement », « diversité culturelle », « héritage culturel », « récompense à la créativité », « enrichissement culturel ». Et quand nous parlons à des jeunes, des termes tels que « fun », « branché » et « cool » trouveront un écho. Nous devons aussi trouver les bons slogans. À l'OMPI, nous avons inventé un slogan pour un festival culturel que nous avons sponsorisé à Genève. C'était : « Soutenons les artistes et respectons leurs créations. »1

De la même manière, dans nos messages de sensibilisation adressés au public, il est mieux d'éviter des termes comme « industries du droit d'auteur ». Appeler la création de musique et de films « industries du droit d'auteur », c'est placer une industrie qui concerne les gens, l'imagination, le divertissement et l'énergie créative sous un éclairage juridique et centré sur l'argent. C'est comme d'appeler la construction automobile « industrie de brevets ». Si nous devons utiliser le terme « droit d'auteur » par souci de concision, appelons ces industries « industries basées sur le droit d'auteur ».

Pour résumer, ce que je suggère, c'est d'éviter d'insister sur l'aspect industriel et économique lorsque l'on s'adresse au public, et de mettre l'accent sur les personnes, la création et l'inspiration.

Que voyons-nous ici ? D'abord, regardez comment, à l'OMPI, ils admettent ouvertement (entre amis) qu'ils sont du côté des détenteurs de droits. Il n'y a même pas une feuille de vigne pour les intérêts de tous les autres, ou même pour l'idée que le droit d'auteur soit nécessaire dans l'intérêt du public (en favorisant le progrès à un coût social raisonnable).

Ensuite, il est amusant que l'expression « droits de propriété intellectuelle » ait été adoptée par les détenteurs de monopoles précisément pour être en mesure de présenter leurs privilèges comme des droits incontestables. L'idée qu'ils puissent éventuellement avoir des devoirs comme des droits, ou que leur pouvoir puisse être limité, est censée être impensable. Qui aurait cru que les usines de la musique et du cinéma étaient « centrées sur l'argent et le droit » ?

Si l'hypocrisie des « droits de propriété intellectuelle » commence à se retourner contre l'OMPI, cela ne signifie pas que nous devrions utiliser ce terme nous-mêmes. Si nous le faisions, nous répandrions une hypocrisie du style OMPI, que ce soit volontaire ou non.


Note de traduction
  1. En français dans le texte.